Formation professionnelle dans la recherche et la pratique
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Bruno Weber prend sa retraite

Les défis de la politique de la formation et les solutions requises

Bruno Weber a été responsable de la politique de formation de Travail.Suisse pendant 25 ans. Pendant cette période, il a accompagné de manière intensive et a contribué à façonner le développement de l’enseignement et de la formation professionnelle. Il est l’un des rares experts à posséder une connaissance approfondie de la formation professionnelle et de l’enseignement supérieur en Suisse. Aujourd’hui, Bruno Weber prend sa retraite, non sans avoir une nouvelle fois rendu compte des défis qui l’attendent. Il a notamment demandé la création d’une commission fédérale de l’éducation au sein de laquelle l’enseignement académique et la formation professionnelle pourront se rencontrer sur un pied d’égalité.


  1. Selon l’article 51.1 de la loi sur la formation professionnelle (LFPr), l’orientation professionnelle, universitaire et de carrière (OPUC) relève de la compétence des cantons. Par conséquent, la Confédération ne participe pas aux coûts. En outre, la loi sur la formation professionnelle ne reflète en aucune façon l’importance des services fournis par l’OPUC. Les parties prenantes l’ont reconnu et l’orientation professionnelle, universitaire et de carrière est devenue un thème important de Formation professionnelle 2030.Depuis lors, les cantons élaborent une stratégie nationale en la matière. Cependant, il apparaît déjà que les cantons n’auront pas assez d’argent pour mettre en œuvre la stratégie nationale. Le projet viamia sera confronté à un problème similaire à partir de 2025. Viamia permet aux personnes de plus de 40 ans de faire évaluer gratuitement leur situation professionnelle. La Confédération prend en charge 80% des coûts jusqu’en 2024. Si aucune solution financière durable n’est trouvée pour cette offre, elle ne sera probablement pas maintenue dans tous les cantons. Le monde politique est donc appelé à trouver des solutions d’ici fin 2024, tant au niveau du contenu que du financement, en matière d’orientation professionnelle, universitaire et de carrière.
  2. Depuis 2013, la formation professionnelle et académique sont regroupées au sein du Secrétariat d’État à la formation, à la recherche et à l’innovation SEFRI. Cependant, pour Travail.Suisse, l’échange entre ces deux domaines ne s’est pas sensiblement amélioré. Sans le Comité du monde du travail au sein du Conseil des hautes écoles, il n’y aurait aucun organe officiel au sein duquel les représentants de la formation professionnelle pourraient entamer une discussion avec la formation académique sur l’ensemble du système de formation. Il convient de remédier à cette situation. L’objectif devrait être de créer, à partir de 2025, une Commission fédérale de la formation qui aurait une vue d’ensemble de tout le système de formation. Cette commission devrait comprendre des représentants de la Confédération, des cantons, des organisations faîtières de l’économie, des employeurs et des employés, ainsi que de swissuniversities.
  3. Les changements dans le monde du travail rendus nécessaires par les développements technologiques ne peuvent être initiés et gérés que par la formation. Les trois types de formation (formelle, non formelle et informelle) sont importants. La formation à l’adaptation joue un rôle important dans ces processus de changement. Les salarié-e-s qui disposent déjà d’un diplôme de niveau secondaire II doivent avoir la possibilité d’adapter efficacement leurs compétences aux nouvelles exigences lorsque leur profession disparaît, lorsque des changements majeurs interviennent dans leur domaine professionnel ou lorsqu’ils changent de domaine professionnel. La politique de formation actuelle se concentre sur les instruments qui mènent à une qualification formelle, notamment par le biais de ces requalifications ou nouvelles qualifications. Jusqu’à présent, on a trop peu réfléchi au rôle que les certificats de branchepourraient jouer dans la formation à l’adaptation. Le Parlement devrait aborder cette question.
  4. Pour les personnes ayant des difficultés d’apprentissage qui n’ont pas accès à une qualification professionnelle reconnue (AFP, CFC), il existe une offre de formation professionnelle privée plus facilement accessible, dite formation pratique FPra. Le fournisseur de cette offre est INSOS Suisse. Selon la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, la Suisse, en tant qu’État signataire, est tenue de mettre en œuvre un système de formation inclusif à tous les niveaux. La questionqui se pose au monde politique est donc de savoir comment il veut atteindre cet objectif et intégrer les services privés d’INSOS Suisse sur le plan organisationnel, juridique et financier dans le système de formation public. Pour Travail.Suisse, cette question doit être résolue d’ici fin 2024, afin que le message FRI 2025-2028 puisse mettre en vigueur les modifications légales qui font sens à cet égard.
  5. En adoptant à l’unanimité les motions 18.3240et 18.3392sur le renforcement des écoles supérieures, le Parlement a clairement exprimé sa volonté de remédier aux faiblesses qu’elles présentent. Il s’agit notamment
    a) du manque de visibilité,
    b) de l’absence de protection de la dénomination «écoles supérieures»,
    c) de l’absence du suffixe «fédéral» dans le titre,
    d) de l’absence de possibilité d’être reconnu en tant qu’institution et
    e) de la possibilité pour les cantons de reconnaître également les filières de formation ES qui n’ont pas de reconnaissance nationale.

Un rapport commandé à la suite des motions susmentionnéesrévèle d’autres déficits, comme le problème du positionnement et de la reconnaissance sur le marché international du travail. Si ces faiblesses ne sont pas corrigées de manière efficace, les écoles supérieures – à l’exception de celle du secteur de la santé – auront du mal à maintenir leur position sur le marché de la formation en tant que prestataires de formation pertinents à moyen et long terme. Le Parlement est donc appelé à donner du poids à la mise en œuvre de ses motions.

  1. La politique de la formation continue est principalement confrontée au problème de la participation inférieure à la moyenne des personnes peu qualifiées. Cela s’explique notamment par le fait que seuls 31% des salarié-e-s sans formation post-obligatoire sont soutenus par leur employeur. Pour les personnes ayant un diplôme de l’enseignement secondaire II, le chiffre est de 56%, et pour celles ayant un diplôme de niveau tertiaire, il atteint 75%. Face à ce constat, l’étude d’Avenir Suisse « La formation continue – mais de manière ciblée » indique à juste titre (Ibid. p.7) que le fossé de formation entre les travailleurs hautement et faiblement qualifiés n’est pas réduit par la formation continue mais, au contraire, s’aggrave. Que faut-il faire à ce sujet d’un point de vue politique? Avenir Suisse est favorable à l’émission de bons de formation continue (Ibid. p.8) pour les personnes peu qualifiées. Travail.Suisse estime qu’il s’agit d’une option valable et demande donc au Parlement d’élaborer un concept d’émission de bons de formation continue dans l’optique du message FRI 25-28 et de créer les bases légales nécessaires à cet effet.
  2. Les hautes écoles suisses sont confrontées à la concurrence internationale. Diverses mesures sont nécessaires pour réussir dans cette compétition. Outre une bonne intégration dans les programmes-cadres européens– qui fait malheureusement défaut aujourd’hui – les points suivants sont pertinents:

Renforcer la capacité de coopération entre les hautes écoles La capacité des hautes écoles suisses à coopérer à l’intérieur du pays est très importante pour leur compétitivité internationale. Au lieu d’alimenter la concurrence entre elles, il vaudrait mieux utiliser et élargir les possibilités de coopération qui existent déjà. À cette fin, les conseils des hautes écoles devraient chercher à échanger entre eux et explorer les possibilités de coopération et de partenariat.

Lancement du baromètre «Bonnes conditions de travail dans les hautes écoles» La qualité et la compétitivité des hautes écoles dépendent largement d’un personnel motivé et compétent. Il est donc important pour une haute école de concevoir les conditions de travail de manière à ce que le personnel soit motivé et satisfait de ses conditions de travail. Pour ce faire, il faut lancer un projet intitulé « Bonnes conditions de travail dans hautes écoles » pour examiner la satisfaction au travail qui y règne. Ce projet doit remplir au moins trois conditions: il doit être conçu pour le long terme afin de pouvoir suivre les évolutions. Il doit être mené dans le plus grand nombre possible d’hautes écoles afin de permettre la comparaison et de rendre visibles les modèles des meilleures pratiques. Il devrait être réalisé par un groupe d’évaluation externe.

Créer et maintenir une culture dynamique de la participation La participation est non seulement une exigence de la loi sur l’encouragement et la coordination des hautes écoles (LEHE), mais aussi un instrument qui les renforce. Elle crée des décisions adaptées à l’avenir en intégrant les diverses expériences des membres des hautes écoles dans les discussions. Elle contribue également à créer une atmosphère de travail motivante et favorable. Malheureusement, les droits de participation ne font pas encore vraiment partie de la culture de gestion, en particulier dans les hautes écoles spécialisées. Ce point doit encore faire l’objet d’un travail intensif.

Viser des gains d’efficacité dans l’administration L’administration a pour mission de créer des conditions optimales pour l’enseignement, la recherche et les services. Toutefois, elle doit être reléguée au second plan dans la mesure du possible. Chaque haute école devrait donc essayer de réduire ses coûts administratifs. Cet objectif ne peut être atteint que si les hautes écoles se fixent des buts clairs à cet égard et prennent les mesures appropriées.

Cet article a été publié pour la première fois dans le service de presse de Travail.Suisse.

Citation

Weber, B. (2021). Les défis de la politique de la formation et les solutions requises. Transfer. Formation professionnelle dans la recherche et la pratique 6.

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